Le papyrus mystérieux

20 juin 2012

De grands chefs utilisent en gastronomie une plante que je découvre . Le priprioca . Quoi ? Le priprioca .

Je parle indien d'Amazonie , forcément , çà ne vous est pas familier . A moi non plus, d'ailleurs .

Au menu , des ravioles et une crème caramel dont on a remplacé la vanille par du priprioca .
D'accord mais ce parfum , vous êtes sûrs que c'est bon à manger ? Pas trop hallucinogène ? Pas trop malauventre ?

What is Priprioca ?

C'est du Cyperus articulatus L.

D'accord , d'accord . Mais encore ? De son nom créole : savane tremblante.

Ce n'est pas le tout , j'ai à faire , moi !

On s'assoit , on lit et on découvre ...

-Grande herbe grégaire (1,50m) des marécages, dressée, elle peut avoir un développement important dans les rizières.

Inflorescences en ombelle dont les fleurs sont assemblées en longs épillets fins, de couleur rouge pourpre à maturité . Pas de bractées florales.

Si je vous montre la photo , çà ira plus vite :

Et çà pousse ici:

Et c'est avec çà qu'on fait tout un plat ? Oui !

Crème caramel à gauche . Raviole au milieu . Champignon au priprioca à droite . Recettes d'Alex Atala, "Cook it Raw" (Cuisinez-le cru)

Il y a de belles légendes qui concernent le priprioca :

Piripri signifie petite, roseau creux, maison.

[...]piripiri était un être mystérieux, dont le corps dégageait une odeur mystérieuse et enivrante qui a attiré les demoiselles du village. Les habitants le poursuivaient et essayaient toujours de l'emprisonner. Quand il fut arrêté, il se transforma en un nuage de fumée et ainsi il s'est échappé.

Un jour, une femme a demandé au jeune chaman Supi ce qu'il fallait faire. Il leur a conseillé d'utiliser ses cheveux pour attacher les pieds de Piripiri. Alors elle la attaché cette nuit-là, tandis que le jeune homme dormait.

Piripiri s'est de nouveau tourné vers la fumée et s' est enfui, cette fois pour toujours. À l'endroit où était son corps , les femmes ont trouvé une racine parfumée.

Le chaman Supi a appris à utiliser l'odorat pour ensorceler les cœurs des femmes. Il leur a dit que Piripiri était monté au ciel et était devenu la constellation Arapari, Trois Maries de la constellation d'Orion. "[...]

Légende prise de Tupi par Brandao de Amorim et cité par Luis da Camara Krab ( Dictionnaire du folklore brésilien)

Piri Piri est une plante très importante dans l'éducation des Curanderos (Chamanes) Yahuas (ou Yaguas) de l'Amazonie péruvienne. Ils l'appellent 'Hiseñu 'ou 'Ivenkiki '.

C'est la toute première plante que l'apprenti Curandero absorbe (décoction râpée de racines), ce qui en fait une "visionary and teacher plant".

Très estimée de beaucoup de tribus de l'Amazone, la racine de Piri piri est comme une aide pour la chasse, pour l'exploration étroite de la surface de la terre. Le Piri-piri provoquerait des hallucinations pouvant prendre beaucoup de formes, telles qu'un feu, une bougie, ou un animal coloré, avec une vitesse réduite.

Chez les Shipibos, les femmes laissent tomber la sève de la racine de Piri Piri sur leurs yeux et voient dans leurs visions qui seront les motifs de leur artisanat.

La recherche pharmacologique a indiqué la présence des alcaloïdes d'ergot de seigle, qui sont connus pour avoir des effets divers sur le corps : de la stimulation du système nerveux à la constriction des vaisseaux sanguins.

Elisabeth Ngo Bum, enseignante chargée de cours à l’Université de Ngaoundéré, a soutenu une thèse d’Etat de physiologie animale. Université de Yaoundé I. Cameroun .

Le sujet : "La détermination des propriétés anti-convulsivantes et certains mécanismes d’action des rhizomes du Cyperus articulatus". Selon elle, le "Cyperus articulatus", couramment appelé en langue française "Souchet articulé", est une plante utilisée en médecine traditionnelle. Elle a des propriétés sédatives et anti-convulsivantes. Elle soigne les maux de tête, l’épilepsie, la fièvre, les morsures de serpent, des oedèmes, des rhumatismes, des maux de ventre, etc. C’était aussi l’occasion pour cette enseignante de vanter les vertus de la médecine traditionnelle car certains patients doutent de l’efficacité des plantes médicinales. Ils se méfient et se posent des questions sur la fiabilité de ces plantes.

Etudes et recherches effectuées dans un laboratoire en Suisse (Bâle) depuis 1993. Un travail de longue haleine, qui a nécessité, selon le Dr. Ngo Bum, plusieurs contrôles : "J’ai fait de nombreuses vérifications sur des souris et les rats au laboratoire sur plusieurs modèles d’épilepsies et directement sur les tranches de cerveau et aux récepteurs impliqués de l’épilepsie". Résultat : le cyperus articulatus contiendrait des substances qui ont des propriétés anti-convulsivantes. Les tradipraticiens l’utilisent d’ailleurs déjà sur le terrain.

Texte de Marthe BASSOMO BIKOE

Alors si au Brésil on vous offre, chez Alex Atala , un plat au priprioca , n'hésitez pas , vous serez envoûté . A ce qu'en disent les critiques gastronomiques .

Cerise violette